Mensuel 015 – Avril 2006

Introduction : Patrick Barillot

En prélude à l’ouverture prochaine, à Paris, d’un centre d’accueil psychanalytique pour adolescents, le Mensuelnous offre une série de textes centrés sur la clinique du sujet à l’adolescence mais aussi sur la dimension proprement politique de cette initiative portée par notre École. La pratique analytique avec des sujets adolescents comporte bon nombre de difficultés et de spécificités, tant cliniques que théoriques, ce dont l’ensemble des textes rend subtilement compte.

Brigitte Hatat introduit une réflexion sur l’usage des produits stupéfiants, qu’à l’occasion Freud qualifia de « briseurs de soucis ». Des soucis, l’adolescent en rencontre plus d’un, et celui de l’assomption de la castration, avec l’angoisse qui l’accompagne, n’en est pas un des moindres.

C’est sur ce point particulier de la réactualisation du complexe de castration à l’adolescence et de la façon dont le sujet enfant y a répondu que porte le travail de Françoise Josselin. S’il est une problématique qui parcourt plusieurs textes, c’est bien celle qui touche à la clinique différentielle entre névrose et psychose. Agnès Dolique et Véronique Sidoit exposent la réelle difficulté à pouvoir trancher, à cet âge de la vie fécond en déclenchement de psychose, entre l’une ou l’autre structure.

Avec le texte de Didier Grais, nous avançons dans les modalités de repérage de la psychose à partir de son expérience en hôpital de jour pour adolescents.

Un autre souci auquel l’adolescent doit faire face tient aux choix à accomplir nécessairement à cette période de la vie. Jean- Pascal Milovanovitch nous montre comment l’exigence de faire le bon choix se mue en un impératif insupportable pour un adolescent obsessionnel.

À ces textes de clinique s’ajoute un plus théorique de Luis Izcovich qui interroge la spécificité du sujet adolescent du point de vue psychanalytique et développe sa thèse qui énonce que si l’adolescent dérange, c’est parce qu’il ne se range pas dans le discours du maître. Il insiste aussi sur les remaniements libidinaux propres à l’adolescence avec la rencontre de la jouissance phallique qui passe par le corps de l’Autre. Il pose aussi la question de l’existence du sujet supposé savoir et donc de la possibilité d’un transfert avec les adolescents. Ce petit panorama clinico-théorique se complète par un point de vue politique sur la création du CAPA. Claude Léger résume fort bien ce que fut la réflexion à l’origine de cette initiative et nous indique clairement en quoi elle répondait à une double nécessité. En premier lieu, le public visé par cette offre : les adolescents. Les textes précédents nous montrent parfaitement à quel point cet âge de la vie est une période charnière dans nos sociétés et que, pour certains, l’adolescence est un moment critique avec sa clinique spécifique. Les remaniements subjectifs et libidinaux qu’elle comporte, avec leurs conséquences symptomatiques, font de l’adolescence un moment propice à la rencontre avec un analyste. La demande est là, mais elle fut longtemps négligée par les pouvoirs publics, qui ont cependant depuis quelque temps redressé la barre. Toutefois, ce qui a été gagné d’un côté, en termes quantitatifs, avec l’augmentation des structures d’accueil et de soin, a été perdu d’un autre côté, en terme qualitatif, par la raréfaction des pratiques orientées par la psychanalyse.

D’où la nécessité pour notre École de se placer comme un acteur du maintien de l’offre analytique en créant les conditions favorables à la rencontre d’un adolescent avec un analyste.

 

ADOLESCENCE

– Claude Léger : Projet de centre d’accueil psychanalytique
– Françoise Josselin : La « crise d’adolescence »
– Luis Izcovich : Adolescence et savoir
– Brigitte Hatat : Le « briseur de soucis »
– Véronique Sidoit : Affres fraternelles
– Jean-Pascal Milovanovitch : Un roman inachevé
– Didier Grais : Le diagnostic à l’adolescence
– Agnès Dolique : Cas limite

SÉMINAIRE CHAMP LACANIEN

– Irène Foyentin : Tous prolétaires ?