La prise du corps dans le malaise contemporain
« Faire interdiction à ce qui s’impose de notre être, c’est nous offrir à un retour de destinée qui est malédiction. Ce qui est refusé dans le symbolique, rappelons-en le verdict lacanien, reparaît dans le réel ». (J. LACAN)
L’individu dressé sur l’Un, telle est l’idéologie des sociétés globales qui court-circuite les destins de l’être du sujet. Dressé sur l’Un des signifiants-maîtres qui règlent les succès de l’ego ; animé à se prendre pour Un dans l’imaginaire de la forme du corps ; collé sur le phallus comme l’Un de la jouissance qui le libère de l’Autre : à cet individu taillé sur mesure de fiction, il ne reste plus qu’à tirer substance de son attachement à un plus-de-jouir de consommation courte. D’où malaise : mal-être du sujet irréductible à l’individu et insatiable manque-à-jouir comme seule subjectivation du corps.
Les formes du malaise contemporain se classent de façon croissante sous les étiquettes de nouveaux syndromes venus de la planète USA qui désignent tous, d’une façon ou d’une autre, un dommage du corps qui s’accompagne d’une extinction de l’esprit et du désir. Nouveaux symptômes ou changement de nom, déguisement du malaise social de tout temps en maladie de l’individu ? Cette approche apporterait-elle des lumières au psychanalyste ? Le discours de l’analyste ne traite-t-il pas le sujet et non l’individu, à la différence du psychothérapeute ? La question n’est pas superflue, du moins à ne pas négliger ce qui se profère dans les milieux psychanalytiques, et cela sans différence d’orientation : leur plainte sur la difficulté croissante à faire entrer en analyse, à éveiller au savoir de l’inconscient ceux qui leur adressent leurs demandes au nom de leur souffrance. Qu’en est-il de ces symptômes qui ne parviennent pas à porter l’être-de-vérité du sujet ?
Comment le ravage ou l’affliction des corps dont de nombreux sujets font les frais est-il proportionnel à ce qui du corps se tient hors-symptôme. C’est le cas lorsque le sujet ne se lie pas à l’Autre : à l’Autre du symbolique, du sexe, et de l’amour.
Sommaire
– L’être, le corps, la jouissance
– Sciences de la vie, jouissance de la vie
– Une jouissance anomalique au corps
– Les affects du sujet contemporain
– La double prise du sujet capitaliste
– Déguisements et reparutions de l’objet a
– Le parc thématique du fantasme
– Ou la psychanalyse ou les techniques du corps