Introduction
Par Laurence Mazza-Poutet
Le Mensuel se fait l’écho du travail dans l’École et de la rumeur du monde, voire de l’immonde, très immonde ces derniers temps, à lire le « coup de gueule » de Claude Léger, « blessé » par les propos du président de la République sur l’hospitalisation psychiatrique.
Interventions aux journées « Le champ lacanien et le psychanalyste »
Le Mensuel a récemment publié les textes préparatoires des membres de la commission scientifique pour les dernières journées de l’École, « Le champ lacanien et le psychanalyste ». Le numéro 40 publie les textes des interventions de ces mêmes journées, pas tous, d’autres seront publiés dans le numéro 41. Ces textes défendent un point de vue, une thèse, un point de clinique, ils sont divers et variés ; de leur énonciation à leur lecture, le travail peut continuer, ainsi que les échanges auxquels leur publication peut donner lieu.
Dans son texte d’introduction, Anita Izcovich pose la question qui est au centre de toutes les interventions : comment la psychanalyse lacanienne est-elle possible dans le champ des jouissances actuel, à condition de savoir s’orienter, puisque, contrairement au discours de la science, la psychanalyse, elle, ne forclôt pas le sujet ? « … son traitement du réel [celui de la science] tend à faire disparaître le sujet, et heureusement qu’il y a l’analyse pour que le sujet puisse mettre à l’épreuve sa substance ».
Le champ lacanien, à l’origine de notre École et dont nous portons le nom, concerne la jouissance et les liens sociaux, la cure analytique, les discours et, dans chacun des discours, la place faite à l’impossible à dire, ce qui reste hors symbolique. La place de cet impossible est à construire, pas de fin d’analyse qui ne rencontre ce point-là, d’où est issu le désir de l’analyste, ce pourquoi Lacan invente la passe, centre névralgique de l’École. La passe, « parce qu’elle constitue une expérience de transmission de ce désir inédit », celui de l’analyste, dont Pascale Leray témoigne avec beaucoup de clarté et de simplicité : « Le champ lacanien implique le désir de l’analyste, non seulement dans la cure analytique, mais aussi dans la transmission de la psychanalyse. »
Transmettre, qu’est-ce qui peut se transmettre de l’expérience analytique ? À cette question tentent de répondre Patricia Zarowsky et Anne-Marie Devaux, la première à partir de l’intraduisible d’une langue à une autre : « L’intransmissible relève-t-il de l’intraduisible ? », question que pose un sujet bilingue, et la seconde à partir de ce qui peut se transmettre de la psychanalyse dans un contrôle de la pratique.
Géraldine Philippe s’arrête plus particulièrement sur les discours, qu’elle interroge à partir des entretiens préliminaires « qui sont une bonne voie pour répondre à la question de ce qu’il y aurait à peser » dans la demande d’analyse. Anne Le Bihan s’intéresse, elle, au discours comme lien social, et « les rapports du lien social avec la jouissance », mais aussi sur la difficulté à aborder le malaise actuel de la civilisation.
Yves Le Bon et Guillermo Rubio témoignent de la présence de la psychanalyse dans les institutions (pour combien de temps encore ?) et de ce qu’ils mettent en place pour y garder le cap du sujet.
Bernard Lapinalie pose la question du corps avec Joyce et Dali à partir de la fin de l’enseignement de Lacan sur le nouage borroméen. Jacques Tréhot aborde la satisfaction dans l’Esquisse de Freud : la satisfaction freudienne équivaut-elle à la satisfaction qui marque la fin de la cure analytique élaborée par Lacan ?
Les questions soulevées par le thème de ces journées ont été nombreuses, le champ de la jouissance s’appelle aujourd’hui le champ lacanien. « Il y a des remarques à faire », disait Lacan, nous l’avons suivi sur ce terrain.
Rubrique REP
Last but not least, Martine Menès nous présente le « Réseau enfants et psychanalyse » et nous signale l’importance et la nécessité de la clinique avec les enfants. La rubrique REP recueillera les textes de ceux qui voudront bien rendre compte de leur travail avec les enfants.
C’est David Bernard qui entame cette rubrique avec « Rêve et adolescence ». Dans La Promesse de l’aube, Romain Gary se souvient qu’enfant il a surpris le pâtissier en train de polissonner avec une jeune fille. Il ne regardera plus jamais les gâteaux comme avant. David Bernard montre, à partir du rêve de Moritz dans L’Éveil du printemps, que pour les adolescents émerge un sens nouveau, le sens sexuel : ce sens sexuel se répand sur le monde des adolescents, à la suite de rêves qui éveillent chez eux un désir nouveau. D. Bernard, à l’instar de Freud et de Lacan, prend au sérieux les rêveries adolescentes : « l’adolescence comme effet d’un sens nouveau qui revient au sujet par le rêve ». Les enfants et les adolescents nous enseignent sur ce « désir nouveau » et énigmatique pour eux, la psychanalyse peut les aider eux aussi « à l’assumer contre la honte de vivre qui, sinon, menace ».
Sommaire
Laurence Mazza-Poutet : Introduction
Le champ lacanien et le psychanalyste : Journées des 22 et 23 novembre 2008
- Anita Izcovich : Ouverture des journées « Le champ lacanien et le psychanalyste »
- Pascale Leray : Du désir de l’analyste
- Jacques Tréhot : De l’expérience originaire de satisfaction imaginaire (freudienne) à la réelle satisfaction de fin de cure (lacanienne)
- Patricia Zarowsky : De l’intransmissible
- Anne-Marie Devaux : Le contrôle : quelle transmission ?
- Géraldine Philippe : La pesée de la requête
- Anne Le Bihan : Discours et lien social
- Bernard Lapinalie : Le borroméen du transfert et de son issue avec Joyce : question de corps
- Yves Le Bon : Carnets de voyage. Psychanalyse et médecine
- Guillermo Rubio : Discours analytique et institution thérapeutique
REP : Réseau enfants et psychanalyse
Chronique
Des nouvelles de l’« immonde » n° 18